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LE VAMPIRE RE'ACTIF, le blog culturel et littéraire de la maison d'édition Le Vampire Actif

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4 mars 2024

Lettres à l'amant de ma femme

Lettres à l'amant de ma femme
L ettres à l’amant de ma femme est un roman épistolaire intime, fondé sur la correspondance qu’adresse un brillant universitaire à l’amant de sa femme dont il imagine et fantasme l’existence. Une œuvre originale servie par une très belle écriture. « Être...
7 mars 2024

Coruscations, étincelles d'aphorismes (suite1)

Un aphorisme est une courte phrase courte, qui peut être une sentence, une sagesse, énonçant souvent une vérité fondamentale. L’aphorisme se suffit à lui-même (en grec, aphorismos signifie la délimitation et par extension, le sentence, la définition).
C’est donc une citation qui, la plupart du temps mobilise l’humour, parfois la métaphore. Il en est de poétiques, de philosophiques, d’apparemment sottes et pourtant vraies… 
De nombreux auteurs se sont livrés à l’exercice de l’aphorisme, certaines devenant souvent des citations, voire des proverbes… 

En voici quelques exemples fameux
François Rabelais    
Science sans conscience n'est que ruine de l'âme

Michel de Montaigne    Au plus élevé trône du monde, on n'est jamais assis que sur son cul.

Victor Hugo    Le plus lourd fardeau, c'est d'exister sans vivre.     Lorsque l’on peut tout savoir, il faut aussi savoir se taire

Oscar Wilde    On devrait toujours être amoureux : voilà pourquoi on ne devrait jamais se marier.   La ponctualité est une voleuse de temps.    N'aimez jamais quelqu'un qui vous traite comme si vous étiez ordinaire.      Quand les gens sont de mon avis, j'ai toujours le sentiment de m'être trompé.     La société pardonne souvent au criminel, jamais elle ne pardonne au rêveur.    J'adore parler de rien, c'est le seul domaine où j'ai de vagues connaissances.    Il faut toujours viser la lune, car même en cas d'échec, on atterrit dans les étoiles.

Friedrich Nietzsche     Je cherchais de grands hommes, et je n'ai trouvé que des hommes singeant leur idéal.    La liberté c’est de savoir danser avec ses chaînes     Ce qui ne me tue pas me fortifie

Mahatma Gandhi      La non-violence est l’arme des forts

Winston Churchill       Ce n'est que quand il fait nuit que les étoiles brillent.

Pierre Dac      Ce ne sont pas les enfants sur la banquette arrière qui font les accidents mais les accidents sur la banquette arrière qui font les enfants.

Michel Audiard     Un intellectuel assis va moins loin qu'un con qui marche.

Pierre Desproges    Au paradis on est assis à la droite de Dieu. C’est normal, c’est la place du mort

Coluche      L’argent ne fait pas le bonheur des pauvres. 

 À suivre...

4 mars 2024

Prochaine publication : Coruscations, étincelles d'aphorismes, Thierry Fresne

Coruscations, étincelles d'aphorismes

Le quatrième opus de Thierry Fresne, à paraître au printemps

Ces lueurs éphémères…

Penser ce que l’on veut, sans esprit de système, sans volonté de convaincre ni appréhension de se contredire, tel est le cadeau tombé d’un ciel traversé de météores aux coruscations fugitives.

Capter sans arrière-pensée ces lueurs éphémères, c’est jouissance d’homme libre qui n’a pas de susceptibilités à ménager ni de partisans à recruter, de message à délivrer ni de trace à laisser, mais seulement de muettes complicités à éveiller, le temps d’une phrase, d’un mot ou d’une virgule.

Et le jour qui se lève de souffler ces brèves clartés comme des cierges, aussitôt trouvé entre l’auteur et son lecteur le commencement d’un accord.

 

Un aphorisme est une courte phrase courte, qui peut être une sentence, une sagesse, énonçant souvent une vérité fondamentale. L’aphorisme se suffit à lui-même (en grec, aphorismos signifie la délimitation et par extension, la sentence, la définition).
C’est donc une citation qui, la plupart du temps mobilise l’humour, parfois la métaphore. Il en est de poétiques, de philosophiques, d’apparemment sottes et pourtant vraies…

Les aphorismes de Thierry Fresne s'inscrivent dans la lignées de celles de grands auteurs du XVIIème au XXème siècle...

4 mars 2024

Lettres à l'amant de ma femme (suite) : Interview de l'auteur

L’auteur - THIERRY FRESNE

Quelles sont les raisons qui vous ont conduit à écrire ce livre ?

En vérité, j’ai toujours éprouvé de la compassion pour les personnages un peu trop complaisamment humiliés par les auteurs de comédies comme de romans : l’ingénu, l’homme crédule, le mari trompé etc., qu’ils se nomment George Dandin ou bien Charles Bovary. Ce livre tente donc une réhabilitation en littérature de ce que familièrement on nomme un cocu, qualificatif qui, par sa sonorité même, incite l’auteur à une racoleuse invitation à la moquerie. Dans ce dessein, j’ai souhaité, face

à notre époque souvent réceptive à l’excès aux discours victimaires, montrer que la dignité ne se conquiert pas dans la plainte mais par la sincérité avec laquelle on assume son état quand il n’est guère enviable.

C’est dans cet esprit que j’ai adopté pour ces Lettres à l’amant de ma femme un style très tenu qui ne se commette pas avec un déversement d’âcre bile empreint de colère ou de vulgarité.

Pourquoi avoir choisi d’utiliser le genre du roman épistolaire pour traiter ce sujet ?

Ce genre m’a semblé être la formule qui concilie le mieux la confession intime du protagoniste avec l’intérêt dramatique dispensé par une intrigue pourvoyeuse d’inattendu et de dénouement.

À quel public s’adresse-t-il ?

En manière de demi boutade, je serais tenté de dire : d’abord à tous les cocus en titre, en souvenir, ou en puissance. Au prix d’une certaine lucidité chez les lecteurs, cela pourrait faire beau- coup de monde ! Ceux-ci trouveraient dans la persistante dignité de cet épistolier se pensant trahi par son épouse une forme de consolation. Quant aux lecteurs plus chanceux – qui pourraient être en l’occurrence bien des lectrices curieuses d’entrer dans le cœur et l’esprit d’un mari trompé –, ils rencontreront au fil de ces lettres quelques considérations sur l’amour, dans lesquelles le recul et parfois l’humour cherchent à préserver une forme d’humanisme dans le regard porté sur la notion de couple.

Cet ouvrage est le troisième publié aux Éditions du Vampire Actif. Quels sont les thèmes des deux précédents ?

  • Le Journal d’un signet : Ce journal, dont l’auteur n’est autre qu’un marque- page, vise à faire de ce gardien solitaire de la littérature tapi dans les livres un personnage à part entière, confessant ses états d’âme comme ses sensations physiques, ses ravissements comme ses emportements, nés de son intimité muette avec les auteurs ainsi qu’avec la lectrice qui l’a adopté.
  •    Cette Nuit qui fut le jour : Ce roman est celui d’une incandescente rencontre amoureuse nocturne que le héros vit comme la transposition dans son existence de sa passion pour le chef-d’œuvre indépassable qu’est pour lui le Tristan et Isolde de Richard Wagner avec sa  nuit envoûtante.

Quels sont vos projets littéraires ?

À cet instant, aucun n’est abouti. Pratiquant une écriture de braconnier bien plus que de bâtisseur, et encore moins de fabricant, j’attends toujours patiemment qu’un thème s’impose à moi à la faveur d’un déclic intérieur ou d’une surprise de la vie. L’important est en outre la forme particulière que je sens pouvoir lui donner. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai une forte inclination pour l’aphorisme, en ce qu’il me visite à travers des pensées qui valent surtout pour leur forme et pour lesquelles un développement serait un peu vain (en projet, Coruscations, étincelles d’aphorismes, à paraître aux Éditions Le Vampire Actif en 2024).

25 février 2024

À paraître : Coruscations, étincelles d'aphorismes, Thierry Fresne

Coruscations, étincelles d'aphorismes, Thierry Fresne

 

Coruscation, définition (Littré) : Terme de physique. Vif éclat de lumière. La coruscation d'un météore.

Le dernier phénomène que présente la coupellation de l'argent, et qui consiste en ce que ce métal, au moment de passer de l'état liquide à l'état solide, jette un éclat très vif qui ne dure qu'un instant.

Aphorisme : Un aphorisme est une courte phrase courte, qui peut être une sentence, une sagesse, énonçant souvent une vérité fondamentale. L’aphorisme se suffit à lui-même (en grec, aphorismos signifie la délimitation et par extension, le sentence, la définition).

C’est donc une citation qui, la plupart du temps, mobilise l’humour, parfois la métaphore. Il en est de poétiques, de philosophiques, d’apparemment sottes et pourtant vraies…

De nombreux auteurs se sont livrés à l’exercice de l’aphorisme, certaines devenant souvent des citations, voire des proverbes…

Quelques exemples connus....

François Rabelais

Science sans conscience n'est que ruine de l'âme.

Michel de Montaigne

Au plus élevé trône du monde, on n'est jamais assis que sur son cul.

Victor Hugo

Le plus lourd fardeau, c'est d'exister sans vivre.

Lorsque l’on peut tout savoir, il faut aussi savoir se taire.

Oscar Wilde

On devrait toujours être amoureux : voilà pourquoi on ne devrait jamais se marier.

La ponctualité est une voleuse de temps.

N'aimez jamais quelqu'un qui vous traite comme si vous étiez ordinaire.

Quand les gens sont de mon avis, j'ai toujours le sentiment de m'être trompé.

La société pardonne souvent au criminel, jamais elle ne pardonne au rêveur.

J'adore parler de rien, c'est le seul domaine où j'ai de vagues connaissances.

Il faut toujours viser la lune, car même en cas d'échec, on atterrit dans les étoiles.

Friedrich Nietzsche

Je cherchais de grands hommes, et je n'ai trouvé que des hommes singeant leur idéal.

La liberté c’est de savoir danser avec ses chaînes.

Ce qui ne me tue pas me fortifie.

Mahatma Gandhi

La non-violence est l’arme des forts.

Winston Churchill

Ce n'est que quand il fait nuit que les étoiles brillent.

Pierre Dac

Ce ne sont pas les enfants sur la banquette arrière qui font les accidents mais les accidents sur la banquette arrière qui font les enfants.

Michel Audiard

Un intellectuel assis va moins loin qu'un con qui marche.

Pierre Desproges

Au paradis on est assis à la droite de Dieu. C’est normal, c’est la place du mort.

Coluche

L’argent ne fait pas le bonheur des pauvres. 

Sydney Smith

Je n'ai jamais lu un livre avant d'en faire le compte rendu, cela donne trop de préjugés.

 

( À suivre)

23 février 2024

Interview de Thierry Fresne

Interview de Thierry Fresne

À propos des "Lettres à l'amant de ma femme"

 

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Quelles sont les raisons qui vous ont conduit à écrire ce livre ?

En vérité, j’ai toujours éprouvé de la compassion pour les personnages un peu trop complaisamment humiliés par les auteurs de comédies comme de romans : l’ingénu, l’homme crédule, le mari trompé etc., qu’ils se nomment George Dandin ou bien Charles Bovary. Ce livre tente donc une réhabilitation en littérature de ce que familièrement on nomme un cocu, qualificatif qui, par sa sonorité même, incite l’auteur à une racoleuse invitation à la moquerie. Dans ce dessein, j’ai souhaité, face à notre époque souvent réceptive à l’excès aux discours victimaires, montrer que la dignité ne se conquiert pas dans la plainte mais par la sincérité avec laquelle on assume son état quand il n’est guère enviable.

C’est dans cet esprit que j’ai adopté pour ces Lettres à l’amant de ma femme un style très tenu qui ne se commette pas avec un déversement d’âcre bile empreint de colère ou de vulgarité.

Pourquoi avoir choisi d’utiliser le genre du roman épistolaire pour traiter ce sujet ?

Ce genre m’a semblé être la formule qui concilie le mieux la confession intime du protagoniste avec l’intérêt dramatique dispensé par une intrigue pourvoyeuse d’inattendu et de dénouement.

À quel public s’adresse-t-il ?

En manière de demi-boutade, je serais tenté de dire : d’abord à tous les cocus en titre, en souvenir, ou en puissance. Au prix d’une certaine lucidité chez les lecteurs, cela pourrait faire beaucoup de monde ! Ceux-ci trouveraient dans la persistante dignité de cet épistolier se pensant trahi par son épouse une forme de consolation. Quant aux lecteurs plus chanceux – qui pourraient être en l’occurrence bien des lectrices curieuses d’entrer dans le cœur et l’esprit d’un mari trompé –, ils rencontreront au fil de ces lettres quelques considérations sur l’amour, dans lesquelles le recul et parfois l’humour cherchent à préserver une forme d’humanisme dans le regard porté sur la notion de couple.

Cet ouvrage est le troisième publié aux Éditions du Vampire Actif. Quels sont les thèmes des deux précédents ?

    

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Le Journal d’un signet : Ce journal, dont l’auteur n’est autre qu’un marque-page, vise à faire de ce                                                      gardien solitaire de la littérature tapi dans les livres un personnage à part                                                      entière, confessant ses états d’âme comme ses sensations physiques, ses                                                      ravissements comme ses emportements, nés de son intimité muette avec les                                                  auteurs ainsi qu’avec la lectrice qui l’a adopté.

 

 

 

 

 

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- Cette Nuit qui fut le jour : Ce roman est celui d’une incandescente rencontre amoureuse nocturne que le                                                 héros vit comme la transposition dans son existence de sa passion pour le                                                     chef-d’œuvre indépassable qu’est pour lui le Tristan et Isolde de Richard                                                         Wagner avec sa nuit envoûtante.

 

 

 

 

 

 

Quels sont vos projets littéraires ? 

À cet instant, aucun n’est abouti. Pratiquant une écriture de braconnier bien plus que de bâtisseur, et encore moins de fabricant, j’attends toujours patiemment qu’un thème s’impose à moi à la faveur d’un déclic intérieur ou d’une surprise de la vie. L’important est en outre la forme particulière que je sens pouvoir lui donner. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai une forte inclination pour l’aphorisme, en ce qu’il me visite à travers des pensées qui valent surtout pour leur forme et pour lesquelles un développement serait un peu vain (en projet, Coruscations, étincelles d’aphorismes, à paraître aux Éditions Le Vampire Actif en 2024).

 

 

 

 

23 février 2024

LETTRES A L'AMANT DE MA FEMME, le nouveau roman de Thierry Fresne

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« Lu d’un trait !!! Conquise et admirative. Amour, finesse, connaissance très profonde des rela- tions amoureuses. Un humour merveilleux. Peu de personnes aujourd’hui s’expriment avec cette élégance. » C.P.

« Ce roman épistolaire rythmé et surprenant se révèle d’une lecture agréable, très fluide. Au fur et à mesure qu’il rédige ses lettres, la personnalité de Thomas, le « mari trompé », se dessine. Sa prétention intellectuelle à « dominer la situation » va se trouver heureusement rabaissée par les sentiments.» M.P.

Présentation

Après Le Journal d'un signet, puis Cette Nuit qui fut le jour, Thierry Fresne, dans la veine des romans épistolaires psychologiques tel Mémoires de deux jeunes mariées d’Honoré de Balzac, propose de suivre les réflexions intimes, peu à peu obsessionnelles, d’un mari qui soupçonne sa femme d’avoir une liaison adultère.

Au fil des courriers successifs qu’il adresse à cet amant inconnu « qu’il n’a pas le déshonneur de connaître » et pourtant de plus en plus incarné, nous suivons les états d’âme, les humeurs et les postures de cet homme qui place de ce fait son concurrent comme son seul confident. Cette démarche singulière est aussi une manière de lui permettre « d’assumer son rôle tout nouveau (?) de mari trompé ».

Les Lettres à l’amant de ma femme traitent avec profondeur, humour et rebondissements, d’une situation somme toute courante avec en permanence un respect du libre arbitre des personnages concernés.

                                                                          ----------------------------------

Résumé

« Être trompé n’a jamais empêché de rester digne. Il suffit d’élever son dépit aux spéculations d’un moraliste. Toute la valeur du cocu est d’être un homme qui doute : de sa compagne, de lui-même, de l’amour. N’est-il pas alors en bon chemin pour de- venir un philosophe ? »

Thomas, un digne universitaire, soupçonnant l’infidélité de son épouse qu’il aime, décide de correspondre avec son amant dans un geste insolite, apparemment fou mais motivé par le souci de sincérité. Entre réalité et fantasme, il se représente son rival et laisse son imagination le construire comme un personnage voué, par nature, à lui échapper.

Dans ce roman épistolaire singulier, d’une étonnante actualité, le doute, la crispation, l’humour sont les visages des tourments de l’amour.

« Le seul amour qui soit, Monsieur, est d’accepter un être tel qu’il devient. »

Photographie de couverture, Rendez-vousMaude(2021) Mathieu Walter – Christophe Béesau

 

2 décembre 2021

Tristan et Isolde, Opéra de Richard Wagner

Tristan et Isolde, Opéra de Richard Wagner

 

                          

 

La légende de Tristan a inspiré Richard Wagner qui compose entre 1857 et 1859, un opéra en 3 actes, Tristan et Isolde, créé le 10 juin 1865 au théâtre royal de la Cour de Bavière à Munich sous la direction de Hans von Bülow. Le livret de cet opéra est écrit par le compositeur lui-même à partir de la légende médiévale celtique de Tristan et Iseult (cf. article précédent).

Inspiré par l'amour de Richard Wagner pour la poétesse Mathilde Wesendonck, cet opéra est une œuvre dramatique, celle d’une passion si intense, si absolue qu'elle ne peut se conclure que sur une fin tragique qui en est une délivrance.

Richard Wagner pioche dans la légende foisonnante et ne retient que les éléments essentiels à son propos. Pour lui, Isolde est amoureuse de Tristan - cet amour est réciproque - bien avant que n’agisse le filtre d’amour dédié à Iseult et au roi Marke, que Brangäne, la suivante d’Isolde, fait boire à Tristan et à Isolde, sur le bateau qui les ramène à la cours du roi Marke, en Cornouailles. C’est cet amour qui a sauvé Tristan de la mort suite à son combat avec le géant Morholt, seul épisode « extérieur à la passion », de la légende que retient Wagner.

Ainsi le breuvage enchanté ne créera pas l’amour, mais en changera la nature, transformant un amour humain réfréné par les convenances et les lois sociales, en un élan irrésistible.

Le livret écrit par Wagner est assez obscur, à la fois texte dramatique, à la fois texte philosophique.

L’œuvre musicale quant à elle est souvent considérée comme l'une des plus importantes du théâtre lyrique occidental. Il est magnifié par une musique somptueuse.

Wagner innove en incluant dans la légende un thème profondément romantique, la « métaphysique de l’Ombre et de la Lumière », soit d’une part la malédiction du Jour, assimilé au matériel de l’existence avec ses contingences et ses obstacles, et d’autre part l’appel à la Nuit qui fait disparaître les obstacles, permet aux amants de se retrouver, de fusionner, et d’atteindre la « höchste Lust ». Cette notion est particulièrement développée chez Novalis qui écrit « Pour l’homme qui aime, la mort est une nuit nuptiale, un secret des doux mystères ».

Un opéra en trois actes

 

L’acte 1 se déroule sur un navire voguant d’Irlande vers la Cornouailles. Il emporte Tristan chargé par son oncle le roi Marke de lui amener Isolde la princesse d’Irlande, afin que leur mariage scelle la paix entre la Cornouailles et l’Irlande. Comme le voyage touche à sa fin, Isolde se confie à sa suivante Brangäne et lui révèle que Tristan est l'assassin de son fiancé Morhold, tué alors qu’il venait réclamer au roi de Cornouailles le tribut qu'il payait annuellement au roi d'Irlande, soit 300 jeunes hommes et 300 jeunes filles. Blessé et empoisonné par l’épée de Morhold, Tristan avait naguère été recueilli et soigné par Isolde qui l'avait reconnu grâce à un éclat de l’épée de Morholt, extrait de sa plaie. Sur le point de le tuer, elle en a été arrêtée par le regard amoureux de Tristan.

Envahie par la honte d’être livrée au roi Marke, qui fut vassal de son père, et par l'amour inavoué et refoulé qu'elle porte à Tristan, l’assassin de son fiancé, Isolde fait préparer par Brangäne un breuvage empoisonné, et projette ainsi de mourir avec Tristan, ce qu’il accepte en toute connaissance de cause. Mais Brangäne, ne peut se résoudre à préparer le philtre de mort et donne à Isolde le philtre d'amour préparée par la mère d’Isolde, pour elle et le roi Marke. Tristan et Isolde boivent le philtre, convaincu qu'ils vont mourir. Ils tombent en extase l'un devant l'autre et, tandis que le vaisseau accoste et que le roi Marke s'avance sous les vivats pour accueillir sa fiancée, Isolde défaille.

À écouter : le prélude https://www.youtube.com/watch?v=J-qoaioG2UA

 

                     

 

L’acte 2 se déroule dans la demeure d'Isolde où, sans tenir compte des avertissements de Brangäne, Tristan vient rejoindre Isolde en secret et tous deux entament un magnifique duo qui, partant d’un suprême amour terriblement humain aboutit à une évocation de l’Amour romantique mystique : « Tristan et Isolde chantent leur désir de consacrer leur amour par une mort qui serait le triomphe définitif de la Nuit sincère et douce sur le Jour vain, perfide et mensonger ».

Ce duo entre Tristan et Isolde (le plus long de l'histoire de la musique) est soudainement interrompu par l'arrivée du roi Marke et de ses hommes. C'est le chevalier Melot qui, par jalousie, a organisé le retour précipité du roi, pour qu’il surprenne les amants. Le roi se voyant trahi par son fils spirituel, exprime dans un long monologue, toute l'affliction qu'il ressent. Tristan invite Isolde à le suivre dans le pays de la mort où il se rend désormais. Il défie Melot et le laisse le frapper.

À écouter :  https://www.youtube.com/watch?v=SdXfe5xdaMA

 

          

 

L’acte 3 a pour décor la chambre de Tristan au château de Karéol en Bretagne où, grièvement blessé, Tristan est plongé dans une mortelle torpeur et veillé par son écuyer Kurwenal. Une triste mélopée emplit l’atmosphère, jouée par le berger chargé de surveiller la mer. Tristan, réveillé, revoit défiler sa vie et s’enflamme au souvenir d’Isolde qu'il veut revoir pour enfin pouvoir mourir. Soudain retentit une joyeuse mélodie qui annonce l’arrivée d’Isolde. Dans un ultime effort, Tristan s'élance à la rencontre d'Isolde et expire dans ses bras en murmurant son nom.

La musique annonce l’arrivée d’un autre navire, celui du roi Marke. Kurwenal s'oppose à l'escorte de Marke, tue Melot, mais périt sous le nombre. Marke, à qui Brangäne a révélé le secret du philtre qui rendait inéluctable l'amour de Tristan et Isolde, est venu unir son parent le plus cher à Isolde à qui il reproche son silence. Mais Isolde, en pâmoison, meurt d'amour sur le corps de son amant Tristan. Le roi Marke bénit les cadavres des deux amants…

À écouter : la mort d’Isolde https://www.youtube.com/watch?v=7tLq5FZ0xlY   

21 novembre 2021

"Cette Nuit qui fut le jour", deuxième roman de Thierry Fresne, présenté au Salon L'Autre Livre les 26, 27 et 28 novembre

 

L’étrange appel que reçoit, un soir d’été, Thibault, trentenaire romantique et mélomane en quête d’absolu, l’intrigue avant de le bouleverser.                                      Qui est cette inconnue avec laquelle il converse durant de longues heures ? Comment peut-elle prétendre le connaître autant que lui-même ? D’où lui vient l’impression d’entendre son double ? Sera-t-elle son Isolde, passionnément sublimée par la musique de Wagner, celle qui lui permettra de vivre l’amour sur les cimes ?                « Aimer, oui, mais comment satisfaire cette soif inextinguible d’absolu qui confi ne à l’impossible dès lors que la perfection n’est pas de ce monde ? Il sentait qu’il touchait là, une fois de plus, à la raison d’être de Tristan, cette consolation suprême face à l’insuffisance de la vie. »  « Il était catastrophé que son époque eût perdu cette ingénuité du cœur et pût se moquer de ceux qui s’émeuvent d’un rien. […] Ses souvenirs étaient source d’émotions intenses et de mélancolies abyssales. Il voyait dans le romantisme, bien avant un mouvement littéraire et artistique, une disposition de l’âme à ressentir intensément le tragique de la vie. »

   

                 Ce magnifique roman traite de l’impossible amour absolu. Il évoque la splendide légende de Tristan et Yseult et notamment l’opéra éponyme de Richard Wagner…

La légende celtique de Tristan et Iseult

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Cette légende majeure a connu une large diffusion dans toute l’Europe. 

Nous ne connaissons pas l’ouvrage original qui la présente dans son ensemble. Aussi est-ce à partir de fragments de textes en versions scandinave, anglaise, allemande, française, italienne qu’à pu être reconstitué « Le Roman de Tristan et Iseult ».

Deux versions, à peu près concomitantes, sont écrites dans la seconde moitié du XIIème siècle, sans doute inspirées d’un roman antérieur.                                                          L’une, due à Béroul, que l’on dit « jongleur », est une version semble-t-il plus proche de la version primitive et des Chansons de Geste, et dont il nous est parvenu environ 3000 vers.

L’autre, dont Thomas d’Angleterre est l’auteur, est destinée à une société plus raffinée celle de la cour d’Aliénor d’Aquitaine. Son roman, dont nous connaissons également 3000 vers environ, propose une trame dramatique élaborée, une                                     

Image2recherche du pathétique et développe le pathétique des                                            personnages, Iseult et Tristan en particulier qui, obsédés par leur passion                        contrariée, ne peuvent trouver la paix que dans la mort. Dans ce roman, l’Amour s’impose aux deux amants, malgré leurs raisons et leurs volontés, au-delà des évènements qui les séparent, voire les opposent.                                                                                       

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Cette fatalité tragique s’impose à eux et mêle l’amertume à leur bonheur défendu, consommé.

Cette passion irrésistible, profondément humaine, est due à un philtre magique, support symbolique qui rend inéluctable cette passion, qui les unit dans la vie et dans la mort, pour une durée de trois ans chez Béroul, éternellement chez Thomas d’Angleterre.

Le scénario
Tristan de Loonois, est un orphelin, élevé en véritable chevalier par l’écuyer Gorneval.     

Il est le neveu du roi Marc de Cornouailles qui l’accueille à sa cour. À peine arrivé, il tue en duel le géant irlandais Morholt, venu exiger de la part de son roi, le tribut de 300 garçons et 300 filles destinés à nourrir un terrible dragon.

Dans ce rude combat, Tristan est blessé par l’épée empoisonnée de Morholt. Les blessures s’enveniment et dégagent une puanteur annonçant la fin funeste du héros. Tristan s’abandonne à la mer, allongé dans une barque parée.

Les courants le portent jusqu’aux côtes d’Irlande où il est recueilli par la reine d’Irlande, sœur de Morholt, et par sa fille, Iseult la Blonde. Craignant d’être reconnu comme l’assassin de Morholt, il retourne en Cornouailles.

 

Image5 A la cour du roi Marc, Tristan paraît peu à peu destiné à             succéder au roi qui n’a pas d’enfants. Mais les barons jaloux,                 imposent au roi de prendre femme. Le roi Marc décide de                     choisir pour épouse la femme à qui appartient le cheveu d’or                 que lui ont apporté deux hirondelles.

 Se souvenant d’Iseult la Blonde, Tristan, qui veut se laver du                 soupçon des barons, décide de partir la quérir pour son roi. Déguisé   en marchand, Tristan débarque en Irlande et affronte le dragon qui     dévore les jeunes filles. Il lui tranche la langue et la glisse sous ses   vêtements puis tombe aussitôt évanoui à son contact. 

Image6 Sur ce, le Sénéchal du Palais, réputé pour sa   couardise, trouve la dépouille du dragon et voit là,   la possibilité d’épouser Iseult la Blonde dont la   main est promise au chevalier qui tuera le dragon.   Il lui tranche la tête et la rapporte triomphant à la   cour du roi Marc.                                                 Mais Iseult trouve Tristan évanoui ainsi que la   langue du dragon. Elle guérit Tristan une nouvelle   fois. Mais observant son épée, elle remarque   qu’elle est ébréchée et que l’éclat retrouvé dans le corps de son frère correspond à l'entaille de l’épée.

Alors qu’elle va lui enfoncer l’épée dans le corps tandis qu’il prend son bain,Tristan lui parle tranquillement et fait appel à la raison. Séduite, Iseult l’épargne, espérant qu’il demande sa main. Mais Tristan obtient la main d’Iseult pour le roi Marc. La déception d’Iseult est immense et c’est résignée qu’elle s’embarque pour la Cornouailles.

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 Sur la nef du retour, Tristan et Iseult, boivent par erreur le philtre         d’amour (éternel chez Thomas d’Angleterre), préparé pour unir Iseult   au roi Marc, son futur époux.
 Tristan et Iseult sont définitivement unis l’un à l’autre et, bien qu’ils       luttent contre leur passion, ils se rencontrent et s’aiment.

 Alerté par les barons jaloux, le roi Marc les surprend et les condamne   au bûcher.

 Tristan, parvient à s’échapper, délivre Iseult                                     

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 et se réfugient, en   compagnie de l’écuyer               Gorneval, dans la forêt du Morois.

 Durant trois ans, ils vivent une vie sauvage            et misérable, et goûtent les bonheurs de l’amour.
Au cours d’une partie de chasse, le roi Marc les surprend endormis, leur fait grâce            et leur laisse des témoignages de son passage. Les deux amants décident de se séparer    et Tristan s’exile.
Iseult pense sans arrêt à Tristan tandis qu’il use de multiples subterfuges pour la croiser    et lui laisser le symbole de leur amour, une branche de coudrier enlacée d’un brin de chèvrefeuille (cf. le Lai du Chèvrefeuille de Marie de France).
De nouveau blessé par une arme empoisonnée, Tristan envoie Kaherdin son beau-frère chercher la reine. La couleur de la voile dira si Iseult est à bord de la nef en retour. Au final les deux amants seront réunis dans la mort.
A suivre….                                                                                                                     Desmodus 1er

19 novembre 2021

L’Orgie latine, Félicien Champsaur (4)

Messaline, l’impératrice, la licence et la luxure

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Claude et Messaline

Afin de mieux comprendre l’ouvrage de Félicien Champsaur, il convient, comme toujours, de préciser dans quel contexte se déroule le récit. En voici quelques éléments éclairants, rappels pour la plupart des lecteurs, sans doute...

Les Empereurs romains reçoivent délégation de leur pouvoir du « Peuple Romain ». En effet, Monarque de fait, le princeps demeure officiellement un magistrat.

statue_augusteCertes, depuis Auguste, l’opinion admet que l’empereur régnant transmette le pouvoir à ses descendants et le sénat entérine la passation sans rechigner. Mais en aucun cas le principat n’est une monarchie héréditaire, telles que l’établiront les royautés médiévales, car la haine des Romains pour les rois exclut tout véritable droit dynastique. La passation de pouvoir est validée par la souveraineté populaire en l’absence de toute légitimité mystique, comme elle existera plus tard pour les rois d’Ancien régime. Ainsi, d’Auguste (- 27 av JC) à Romulus Augustinus (476 ap JC), soit sur environ 500 ans, ce ne seront pas moins de quatre-vingt-huit empereurs, appartenant à six dynasties d’Occident et une d’Orient (8 empereurs), qui règneront, sans compter une trentaine d’usurpateurs. Et encore, ces sept Maisons ne regroupent-elles que 38 empereurs !

Naturellement, en l’absence de règles précises de dévolution, de très nombreux prétendants de l’extérieur et de l’intérieur se déclarent candidats à la pourpre. D’où les assassinats préventifs sur ordre de l’empereur ou de la part de son entourage zélé, pour éviter qu’il ne tombe sous les coups d’un ambitieux de sa famille ou du dehors.

Ainsi l’empereur Claude, dont il est sujet dans L’Orgie latine, même s’il n’apparaît qu’en filigrane sauf au dernier livre, récit sous forme d’un acte théâtral de la mort de Messaline, n’était pas le mieux placé sur l’arbre généalogique, car, en tant que quatrième empereur de la dynastie des Julio-Claudiens, il ne descendait pas directement d’Auguste. Claude vit le jour à Lyon, le 1er août de l’an 10 av JC, fils de Tibère et de sa seconde épouse, Julie, nièce d’Auguste, qu’il avait épousé en -11 av JC.

Certes Messaline renforçait sa légitimité mais pas suffisamment car elle descendait, tout comme lui, d’Octavie et non d’Auguste lui-même.

Les représentants de la ligne directe suscitaient donc des inquiétudes pour le couple et pour Britannicus, le fils de Messaline, né en 419782262040352_large ap JC, Messaline étant alors âgée de 16 ans. L’historiographie ne fait grâce d’aucun défaut à Messaline. En avait-elle plus que toutes les femmes de pouvoirs qui, en concurrence, vivaient auprès d’elle ? Sans doute pas. Mais, comme le souligne avec force Pierre Renucci dans son excellente bibliographie consacrée à Claude, parue chez Perrin en mars 2012, « elle était impératrice et mère d’un enfant dont la survie passait par l’obtention du pouvoir. [...] Son souci primordial était de maintenir son couple au pouvoir pour le transmettre à Britannicus. » Elle va s’y employer en s’appuyant sur les affranchis de Claude, ses ministres, qui ont évidemment tout intérêt au maintien au pouvoir de leur empereur.

C’est ainsi que Julia Livilla, une des deux sœurs de Caligula, (l’autre étant Agrippine II), intrigante auprès de Claude et surtout épouse de Vinicius auquel le sénat avait envisagé de confier le pouvoir à la mort de Caligula, fut exilée dans l’île de Pandateria sous l’accusation d’adultère, puis exécutée tandis que son prétendu amant, le philosophe Sénèque,  était relégué en Corse. Etrangement, Agrippine II, pourtant mère d’un garçon de quatre ans qui comptait comme un candidat pour la pourpre, ne fut pas inquiétée. Elle était plus aimable avec l’impératrice et amie de sa mère, Domitia Lepida qui s’était occupée du petit Néron pendant son exil. Parallèlement, de multiples autres prétendants, issus de dynastes républicains (Sylla, Pompée, Salluste), furent dans un premier temps  « attachés » à Claude, notamment par des mariages prestigieux, des distributions de charges et d’honneurs.

Il s’agit là d’une des nombreuses variations sur le thème de la dépravation de Messaline. Les auteurs anciens présentent en effet systématiquement cette femme comme une nymphomane du genre prédatrice, ce qui n’est sans doute par la réalité. Ils ont été en effet fortement influencés par les mémoires de son ennemie Agrippine II qui, tout comme elle le fit pour Tibère et Caligula, a sans aucun doute été à l’origine des légendes noires de ces trois personnages (les écrits concernant Messaline ne nous sont pas parvenus).

Entre 41 et 48, de très nombreux complots seront déjoués et leurs instigateurs plus ou moins sévèrement punis. L’année 47, l’empereur Claude échappe à 4 tentatives d’assassinat à l’arme blanche par des chevaliers... Les temps étaient redoutables.

Début 48, le couple impérial était débarrassé de ses parents et de ses alliés les plus indésirables parce que les plus légitimes pour briguer le pourpre. La dernière victime de cette épuration des comploteurs fut Asiaticus, un Allobroge originaire de Vienne, devenu très puissant, peut-être soupçonné de vouloir soulever l’armée du Rhin, plus sûrement, dernier comploteur de la mort de Caligula à périr... Ainsi Claude, présenté par les historiographes après sa mort comme un imbécile, avait-il réussi à déjouer, avec son épouse, des coups d’Etat, des tentatives d’assassinats, et élagué les candidats trop pressants de sa succession souhaitée, souvent accélérée. 

Le « mariage » de Caius Silius et Messaline

IMG_0303En 48 éclata une curieuse affaire dite « le mariage de Messaline » dont l’issue sera fatale à l’Impératrice et qui allait bouleverser les données dynastiques. C’est une affaire qui reste obscure car les intérêts des protagonistes sont loin d’être évidents. Messaline s’éprend de Caius Silius, consul désigné pour 49, et aussi « le plus beau des Romains ». Caius Silius, sur la demande de Messaline, divorce de sa propre femme, au risque de déplaire à Claude. Caius Silius souhaite, au départ, une liaison discrète. Mais Messaline l’expose en permanence, transfère une partie de son mobilier chez lui avec une partie de sa suite. Tacite précise qu’à partir de ce moment Caius Silius envisage un coup d’Etat contre Claude. Messaline est alors accusée par Agrippine, dans ses mémoires, de dépravation et de lubricité ainsi que de complicité dans la préparation de ce coup d’Etat, voire d’en avoir été l’instigatrice...  Il est courant que les attaques sous la ceinture visent les puissants et en particulier les femmes. Suétone parle de « débordements scandaleux » et Tacite « d’adultères trop faciles », et « de voluptés inconnues », ce qui ne signifie pas grand-chose, en tous cas qui ne dénote pas de conduites plus scandaleuses que la moyenne à l’époque : on ne connaît que 4 ou 5 amants à l’impératrice, ce qui est somme toute peu. A ces témoignages, s’ajoute ce que conte Juvénal dans ses « Satires ». Pierre Renucci note ainsi que « Messaline aurait eu l’habitude de quitter le palais la nuit pour se prostituer dans un lupanar, sous le nom de Lycisca, une perruque blonde sur ses cheveux bruns. Et elle se serait donné à cette activité avec tant d’ardeur, qu’elle était la dernière des filles à quitter sa cellule quand le taulier fermait la boutique. Reste à citer Pline l’Ancien qui, en tant que naturaliste,  relève avec intérêt, les vingt-cinq passes que cette force de la nature était capable d’assumer en un jour et une nuit. » Pierre Renucci précise que « les débauches prêtées à Messaline n’avaient rien d’exceptionnelles. Au premier siècle, la liberté de mœurs régnait dans l’aristocratie et peut-être aussi dans la plèbe romaine ». Même si de nombreuses matrones s’essayaient à jouer à la prostituée, Pierre Renucci « ne croit pas que l’impératrice s’y soit essayée, bien que ce ne soit pas totalement impossible. Mais le plus probable reste toutefois que Juvénal met en vers l’un de ces nombreux ragots qui courraient les rues. »

En dehors de cela, la perspective de ce mariage est incompréhensible car « sa nouvelle attitude qui consistait à s’allier à Silius, sansIMG_0289 tuer Claude, est parfaitement contradictoire, inconséquente et pour tout dire suicidaire. » Alors ? Un coup de folie amoureuse, un cas authentique d’amour fou, selon la thèse de Paul Veyne ? Un mariage pour rire, une farce, une de ces fêtes de « gosses de riches » dont l’historiographie offre plusieurs exemples ? Une bacchanale échelonnée sur quelques journées et couplée avec un spectacle de vendanges tel qu’il s’en donnait pendant les vindemiales et pendant lequel on célébrait le mariage de la divinité célébrée ? Le texte de Tacite que Félicien Champsaur transcrit dans son roman, mentionne clairement cette bacchanale : « Messaline, à présent, plus luxurieuse que jamais, célébrait, dans le palais, le simulacre d’une vendange parmi la splendeur de l’automne. Autour des pressoirs foulant les raisins, des cuves d’où coulait le vin nouveau, des femmes ceinturées de peaux de bêtes s’ébattaient, sacrifiaient, bacchantes en folie. Luxuria, elle-même, les cheveux épars, agitait un thyrse, le caressait, tandis que Silius, couronné de lierre, dirigeait le chœur lascif du balancement de sa tête et du frappement de ses cothurnes ».

Claude aurait-il lui-même donné son accord avant son départ pour Ostie ? Suétone le sous entend « mais ce qui dépasse toute vraisemblance, c’est que, pour les noces de Messaline avec son amant Silius, il signa lui aussi un contrat, car on lui avait fait accroître qu’ils simulaient un mariage dans l’intention d’éloigner et de faire retomber sur un autre un péril dont lui-même était menacé, d’après certains présages ». Le dernier livre de L’Orgie latine évoque très clairement cette hypothèse mais en sous entendant que les deux amants étaient à l’origine du mauvais présage...

Les affranchis de Claude, ses ministres les plus proches, qui lui doivent tout et ont trempé directement dans les assassinats des concurrents, que sont Narcisse, Pallas et Calliste, voient d’un très mauvais œil la montée en grâce de Silius qui a tout pour devenir empereur. Après avoir envisagé dans un premier temps d’éloigner l’impératrice de son influence, ils échafaudent un plan destiné à prouver à Claude la participation de Messaline au complot de Silius.

Félicien Champsaur, sous formes de scènes successives dans le dernier acte de son ouvrage fait, fidèlement aux écrits qui nous sont parvenus, le récit de cette dernière étape qui s’achèvera par la mort de Silius, de ses proches, puis par celle de Messaline... assassinée par le tribun, sur l’ordre de Narcisse.

L’Orgie latine, roman de la décadence, hymne à la luxure.

IMG_0306L’Orgie latine se déroule dans le courant de cette année 48 et retrace les principaux évènements tragiques de cette année déterminante pour la dynastie des empereurs romains.

Félicien Champsaur s’empare du personnage de Messaline, car « Messaline, ce n’est pas seulementune femme, c’est une foule, – celle de nosancêtres.C’est une foule, oui, parce qu’Elle a eu, vivante,tout le peuple romain, à ses pieds, dans une contemplationfaite de haine et de désir, – le peuple romain, avec ses consuls, ses augures, ses tribuns, ses patriciens, ses gladiateurs, ses soldats, ses portefaix et ses prostituées, – le peuple romain dont le sang coule dans nos veines. »

Quant à la luxure, que L’Orgie latinecélèbre – tout comme le fait avec un immense talent PierreimagesCATHMZOB Louÿs dans son Aphrodite, ou encore Alfred Jarry dans sa Messaline, deux récits beaucoup plus érotiques –, Félicien Champsaur s’en empare car proclame-t-il,  son étude est « plus utile que la guerre, plus noble que l’avarice, moins criminelle que les vols, les empoisonnements, les assassinats qui sont les aventures de tant de drames et de livres et qui encombrent l’histoire de tous les peuples ».

En outre, le romancier moderne doit « écrire pour les hommes qui pensent, pour les femmes qui sentent, pour des êtres majeurs qui ont aimé, qui aiment, qui aimeront, pour les yeux libres et émancipés capables de tout lire, pour les cerveaux – au contact joyeux ou triste de la vie universelle – mûris et fécondés. »

Ainsi L’Orgie latine  « n’est pas seulement un roman dramatique déroulant son action à travers des agonies et des sensualités, cemessaline_alfred_jarry_de_alfred_jarry_927140730_ML livre est un éducateur qui peint, en une fresque singulière, la vie d’un peuple, la couleur d’une époque, et, pour la personnifier, ranime une femme extraordinaire, femme autant que légende [...] digne d’incarner une époque. »

9782070400027Dans son ouvrage « Le Sexe et l’effroi » Pascal Quignard écrit : « Le règne d’Auguste est contemporain de la métamorphose de l’érotisme précis et joyeux des Grecs en mélancolie effrayée. Cette mutation n’a mis qu’une trentaine d’années à se mettre en place (de moins 18 avant l’ère à 14 après l’ère) et néanmoins elle nous enveloppe encore et domine nos passions. De cette métamorphose le christianisme ne fut qu’une conséquence, reprenant cet érotisme pour ainsi dire dans l’état où l’avaient reformulé les fonctionnaires romains que le principat d’Octavius Augustus suscita et que l’Empire romain durant les quatre siècles qui suivent fut conduit à multiplier dans l’obséquiosité. » Et, en effet, pascal Quignard montre comment « ces changements se sont réalisés dans l’Histoire par des glissements progressifs qui donnent à l’épicurisme et au stoïcisme le statut de forces qui déprécient et9782253942634 disqualifient la chair » et comment « le christianisme n’aura pas eu beaucoup d’efforts à faire pour cristalliser ces mépris », comme le résume parfaitement Michel Onfray dans un des merveilleux textes qui constituent son journal hédoniste intitulé « Le Désir d’être un volcan ». 

« La luxure de la Rome impériale, ses ardeurs, ses héroïsmes, sa force, ses faiblesses, avant sa déchéance, l’invasion et le renouveau des barbares, on les retrouve dans la volupté, les goûts, les révolutions ou les guerres, les énergies et les dépressions, bref dans le tempérament des nations latines » affirme Félicien Champsaur qui souhaite ainsi replacer son œuvre dans une actualité, celle de son siècle (le début du XXè).

Et d’ajouter : « Ceci pour qu’on sache bien que, dans ce livre, il n’y a pas qu’une étude de la luxure romaine. Certaines gens ressemblent, sans doute, à ces cochons que l’on mène dans les bois de chênes, parmi de beaux paysages, pour y déterrer des truffes. Les animaux, de leurs groins, fouillent le sol, sans voir la beauté de ce qui les entoure ou les domine : les fleurs, le remuement des branches, le frisson incessant des feuilles, les oiseaux, les insectes, la vie charmante d’une forêt, et, par-dessus tout, l’immense ciel bleu irradié de soleil. Ceux-là, dans cette évocation d’un passé de gloire, de foi, d’amour, d’énergie, de luxure aussi, – car elle est éternelle, étant la vie même, – ceux-là ne verront dans ce livre, L’Orgie latine,que l’occasion de rôder dans l’intimité des rues chaudes de Suburre, dans ses tavernes de gladiateurs et de filles, ses lupanars, et de caresser, en songe, l’Impératrice nue,peut-être, dans le mystère d’après la mort, encore inassouvie. »[...]

Jean_Leon_Gerome_389599Car L’Orgie latine est aussi un prétexte pour dénoncer, comme Félicien Champsaur le fera dans d’autres de ses œuvres, l’hypocrisie bourgeoise et les censeurs de tout poil, bras zélés d’un pouvoir aussi pudibond et cul-béni en façade que dissolu et pervers en arrière cour. « Les imbéciles ou les tartufes qui jetèrent de l’encre sur le groupe des danseuses de Carpeaux, à l’Opéra, étaient des négateurs, inconscients, je veux le croire, de la Vie elle-même. La sensualité n’est ni un vice, ni un péché ; c’est le but vers lequel convergent toutes nos aspirations, nos rêves, nos efforts, et c’est d’Elle que sort, dans l’univers, la perpétuation des espèces et des races. Vraiment, – puisque les maîtres les plus illustres ont représenté nus l’homme et la femme dans tous les siècles  puisque tous les artistes italiens, français, espagnols, flamands ont eu le souci constant du nu, dont tant d’anecdotes et d’allégories païennes ou religieuses ne sont que le prétexte, du nu resté le summum des œuvres plastiques, – puisqu’il n’est pas, jusqu’aux cartes postales d’aujourd’hui qui ne fassent connaître au monde entier les plus jolies femmes d’art et d’amour de chaque pays, prises par l’objectif du photographe en des poses suggestives accusant leurs formes dévoilées, ou nues parfois, simplement ; – puisqu’on publie, par livraisons, des albums de reproductions de photographies de modèles nus ; – puisque, dans les salons de peinture et de sculpture annuels, autour de marbres et de plâtres très nus, évolue le public, jeunes gens, jeunes filles, messieurs mûrs ou vieux marcheurs, mamans, causant, fleuretant ; – pourquoi le nu, permis aux autres artistes, semble- t-il défendu, par les hypocrites, à la littérature » 

Et, plus loin, dans sa formidable introduction à son roman : « Pourquoi l’étude de la luxure, plus utile que la guerre, plus noble que l’avarice, moins criminelle que les vols, les empoisonnements, les assassinats qui sont les aventures de tant de drames et de livres et qui encombrent l’histoire de tous les peuples, – pourquoi une étude, parmi d’autres travaux, de la luxure serait-elle défendue au romancier moderne (et puisque, dans les tragédies des maîtres grecs, Eschyle, Sophocle, Euripide, se mêlent, à chaque instant, toutes les horreurs des passions humaines, les incestes, les empoisonnements, les assassinats ; puisque les religions, les morales, les arts et les littératures, les poètes lyriques et épiques, les éloquences militaires et civiles, à l’envi, n’ont cessé, depuis Caïn et Abel, de glorifier les guerres, c’est-à-dire le meurtre innombrable, le carnage, le vol en grand, le pillage avec le86_000853 viol de ci, de là ; la Mort enfin – pourquoi interdire de célébrer l’Amour, plus loin que dans ses préludes, jusque dans son apogée, et son but de nature, le Baiser, – pourquoi tirer toujours sur deux beaux êtres joints, comme un rideau banal, plusieurs lignes de points ? La guerre, aux louangeurs officiels louangés et récompensés d’honneurs dans tous les pays, c’est la Mort, et la luxure, je le redis, c’est la Vie. – « Une nuit de Paris réparera tout cela », disait Napoléon1er, un soir de victoire, sur le champ de bataille couvert de milliers de cadavres. Alors pourquoi l’étude de la luxure, plus utile que la guerre, plus noble que l’avarice, moins criminelle que les vols, les empoisonnements, les assassinats qui sont les aventures de tant de drames et de livres et qui encombrent l’histoire de tous les peuples, – pourquoi une étude, parmi d’autres travaux, de la luxure serait-elle défendue au romancier moderne (et artiste, bien entendu) ? »  

Ainsi, « Tout héros de roman ou de drame étant, par principe, un être d’exception, Messaline, certes, devait être choisie pour incarner la Luxure, – Messaline, insatiable de stupre autant que de poésie, furieuse, lubrique, curieuse de tout, de tous et de toutes, jamais rassasiée pas plus d’érotisme que d’idéal. En Elle, l’Impératrice Luxuria,se résume et se magnifie toute la sensualité latine, – avant Messaline, et après.  [...] Il ne faut pas célébrer ou dénigrer en Elle seulement l’apogée, la floraison en une orchidée extraordinaire et immortelle, un épanouissement de la débauche païenne. Non. Ce livre, trempé de vérité, remonte aux sources de la religion catholique, apostolique et romaine, montre parmi les esclaves, les misérables, les simples, l’infiltration, dans les esprits et les cœurs, des idées d’une secte qui est devenue l’une des plus puissantes religions de la terre. Malheureusement, cette secte a installé, dans l’univers, l’hypocrisie, alors que, avant Jésus, toutes les religions et toutes les civilisations, latine, grecque, orientale, glorifiaient le phallus, le priape, le lingam, la procréation, la fécondité, l’acte de vie enfin.

Jean_L_on_G_r_me_Le_March__aux_EsclavesLe christianisme a caché, comme une honte, les organes de la génération, dédaigné le souci du corps pour la seule exaltation de l’âme, si bien qu’au moyen âge et plus tard, sous l’établissement triomphal de la domination catholique, on a méprisé l’hygiène. [...] Jésus n’est pas responsable. L’apôtre de la Galilée avait pour son corps les soins qui étaient et qui sont toujours dans les coutumes, et même dans les rites religieux, des Orientaux. Ayant pour tous les êtres la grande bonté aryenne, il ne méprisait pas les femmes d’amour, dont plusieurs, selon les évangiles, le suivaient, l’assistant de leurs biens ; et l’une d’elles, Marie de Magdala, sœur de Marthe, oignit Jésus de parfums et, après les ablutions habituelles, lui essuya les pieds avec ses longs cheveux blonds. Jésus, propre et net en tout son corps, est nu aussi sur la croix, pour l’adoration de ses amoureuses éternelles. »

En hédoniste convaincu, Félicien Champsaur affirme qu’« il faut réagir, proclamer notre réhabilitation corporelle, dans une ardente foi païenne, célébrer, éperdument, la splendeur de la chair, s’insurger contre la conception dévote qui défend et trouble d’une idée de péché l’observation et le culte de la beauté humaine. »

On comprend mieux ainsi l’odeur de souffre qui a entouré –et entoure encore aujourd’hui- nombre des écrits de Félicien Champsaur, insupportables dans la dite « bonne société ».

 

Messaline, stéréotype de la femme décadente

Messaline évoque et réclame inlassablement les jeux de l’amour, la sensualité, les plaisirs...

Félicien Champsaur reprend à son compte, mais certainement pas avec le même objectif, les rumeurs et les scandales au sujet de la conduite dissolue de Messaline, rapportés, dans leurs écrits, par les « historiens » que sont Tacite, Suétone et Juvénal, dont nous avons vu plus haut non seulement la subjectivité mais encore la volontaire fausseté.

En voici, en avant première, quelques très courts extraits, petite partie du vaste récit descriptif que livre Félicien Champsaur dans sonIMG_0299 roman... 

Au Cirque, c’est l’Amour et la Mort confondus dans un relent de luxure, « c’est la douleur et c’est le plaisir aussi, l’angoisse et la volupté ; sur les lèvres pâlies des femmes une émotion incomparable de désir, de danger, qui, après le spectacle, affolera les ruts. »

Dans les jardins de Silius, les danseuses poursuivent « les roses de chair et les œillets pourprés, blancs, où ont plu des gouttelettes du sang des colombes».

Sur la voie Appienne, en accompagnement du cortège de Messaline : « Processionnelles, en robes blanches, fendues le long des corps et laissant transparaître le rose des chairs, de jeunes ballerines, porteuses de luths fragiles, tourbillonnent, miment des appels d’amour et de tendres coquetteries. IMG_0301Ensemble, deux à deux, elles dansent enlacées, leurs corps souples et leurs menus seins en avancée vers les convives, les lèvres écarlates dans la crème des faces, les bouches aux arcs tendus, les bouches tentatrices. Lentement, elles esquissent des pas hiératiques, les mains levées, semblent demander grâce, puis le rythme s’accélère, et paraît, au milieu des groupes, une nouvelle saltatrice, vêtue de fils de perles qui grelottent et s’écartent sur la gracieuse nudité d’un corps adorablement serti à la taille d’une ceinture d’or, gemmée de turquoises, de rubis et d’émeraudes, de perles blanches. La danseuse traduit en gestes harmonieux la fête des caresses qu’elle ignore et appelle, suppliant Aphrodite dont il semble que l’hallucine une imaginaire vision. Et sa bouche frissonne d’une soif d’amour. »

Dans le palais, au cœur de l’Orgie, « Follement, elle s’est élancée, soulevant des deux mains sa robe de gaze violette, pailletée d’or, d’argent et semée de pierreries. On dirait une libellule dont le corps serait d’une femme. Elle saute et il semble qu’elle vole, si légère est la saltation de ses membres grêles, blancs, à peine dorés de l’or de raisins clairs dans le soleil. Sous la lumière des torchères et des lampes, elle virevolte, tournoie, fleur de chair, de clarté, de pierreries – et d’avril.IMG_0300 Plus lentement, elle festonne des pas rythmés où tout son corps s’offre, liane callipyge et artiste, pour, en un geste pudique, échapper à une soudaine étreinte imaginaire, en un jeu tour à tour provoquant et chaste. Parfois, le corps menu et merveilleusement modelé de la mignonne ballerine se dérobe à demi sous la transparence de la robe, puis s’éploient et battent vertigineusement les ailes diaprées de reflets. Karysta la Tanagréenne – fleur, femme, flamme, joie, douleur, amour, gemme, papillon, fée – danse, follement, éperdue de l’ivresse triste de son âme. »

Dans Suburre, au cœur du quartier des plaisirs, « les étuves, les tavernes, les lupanars illuminaient leurs façades de lampes à plusieurs becs, et de longues lanternes rondes, de corne rose transparente, affectant les formes de priapes démesurés. La basse plèbe aimait l’Impératrice, pour la splendeur de son corps et les aubaines qu’elle valait aux pauvres – chacun pouvait espérer être, un soir, l’Empereur, jouir comme César Auguste, se pâmer aux mêmes étreintes, – et aux jolies pauvresses, même pour ses caprices qui la faisaient se plaire à jeter l’or aux plus minables, à la moindre occasion de plaisir. »

sexe12A l’intérieur des étuves, transformées, à la nuit tombante, en un bruissant lupanar, tout appelle aux plaisirs : « À travers de longs couloirs éclairés par des torches aux formes phalliques, [...] des lampes triangulaires, en forme de sexe de femme, pendaient, par trois chaînettes dorées, des voûtes. Scellés aux murs, des bras érigeaient des membres humains d’où la lumière tombait fuligineuse et brouillée, empuantissant l’atmosphère de relents d’huile brûlée, mêlés aux parfums crapuleux des basses prostituées. Des fresques obscènes ornaient chaque côté des longs corridors, [...] les amours de Jupiter et de Léda, l’enlèvement d’Io, que le dieu, formidablement armé, saillait. Ailleurs, des corps s’enchevêtraient, en un pêle-mêle de croupes, de seins nus que des mains agrippaient, de bouches agrafées,thermesplaisirs de mâles et de femelles, fous de voluptés, bouches âpres et délicieuses, crispant des sourires sur des lèvres tordues des douleurs exquises du spasme.  Ici, sur un lit d’or que des peaux de panthères recouvraient, une femme blonde se livrait à trois hommes, et les yeux de la voluptueuse exprimaient une béatitude suprême, grands ouverts et comme figés. – Ailleurs, des Bacchantes harcelaient un Silène comme des abeilles s’abattant en tourbillon sur une fleur convoitée par chacune ou sur un rayon de miel. Pas une fossette du demi-dieu, pas un sillon de chair blanche et rosée où des mains ardentes et des lèvres cupides n’aillent butiner des joies qu’elles 21apantelaient toutes de compléter du grand baiser. Des couples s’ébattaient autour du groupe principal ; des faunes, des sylvains et des Pans, acharnés après des nymphes, des femmes, dont fleurissaient les nudités en rut. Des lesbiennes, tendrement, se caressaient en face d’hommes furieux, liés en des étreintes où les sexes demeuraient séparés.

Des bêtes, des cerfs, des sangliers, des léopards, des tigres et des lions, des ours monstrueux et des aurochs, s’accouplaient en une furie bestiale. D’étranges baisers, des querelles et parfois du sang ; des scènes de festin et d’orgie, des danses et des offices orientaux où des hommes violaient des pierres en forme d’organes féminins et les femmes baisaient des phallus d’airain, d’ivoire, de marbre ou de bois.

Les vestibules résonnaient des pas des couples de hasard, des soupirs, des odeurs de40 chairs énamourées, des bruits de baisers, des frôlements, des cris de volupté, des voix disputeuses, à propos du salaire des baisers que les courtisanes rançonnaient ; des injures se croisaient avec des éclats de voix en échos. Parfois les gardiens devaient intervenir, et les coups de leurs lattes de bois sur des dos qui fuyaient ou dans les jambes d’hommes qui ne voulaient pas partir, brisaient la rumeur perpétuelle de volupté douloureuse de la maison infâme. Des portes s’ouvraient pour laisser partir les mâles repus, claquaient sur les couples s’enfermant dans les cellules.

Il y avait des cubicules de genres divers : uniformément, à droite, un lit de pierre ou de briques maçonnées, une lampe à trois becs fumeuse au plafond ; et, creusée dans une dalle, une vasque où de l’eau, par un conduit, sourdait ; sur un piédestal, toujours, une divinité phallique, une Vénus physica ou Vénus impudica, narquoise, souriait, faisant le geste de la vie. Des roses, des lys, des couronnes de jasmin, en offrande, les paraient.

Selon le prix de la tessera, les lits étaient recouverts de peaux de buffles ou de belles toisons de fauves. Une clepsydre, dans les chambres les plus riches, laissait monotonement tomber avec lenteur des gouttelettes d’eau.

cabinet3Les plus pauvres cellules étaient jonchées de roseaux ou de paille. Sur le sol pavé d’une mosaïque de petits cubes d’une composition imitant la pierre, abaculi – c’étaient encore, figurés par cette marqueterie polychrome, des orchidées aux pistils dressés, ou des phallus, des lèvres entr’ouvertes de femmes, des doigts câlineurs, des symboles sensuels ou des devises voluptueuses. »

Félicien Champsaur reprend ici la description des nombreuses fresques à caractères érotiques découvertes lors des fouilles archéologiques, par exemple à Herculanum à Pompéi...

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Quant à la conduite de Messaline elle-même, à sa nymphomanie et à ses excès, nous laissons au futur lecteur de L’Orgie latine le plaisir d’y assister, d’y participer même devrions-nous écrire, tant la plume de Félicien Champsaur en révèle et en fait vivre, la fièvre, les affres, les soupirs et les fureurs...

Découvrez ce récit épique dans le roman historique L'Orgie Latine                                           Desmodus 1er

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